Un garde du corps doit-il posséder un port d’arme ? (2017)
C’est le débat majeur qui agite notre profession et qui concerne le port d’arme. Faut-il armer les APR (Agents de Protection Rapprochée) pour qu’ils remplissent leur mission au mieux ?
En théorie, la réponse en France est relativement simple : la loi interdisait jusqu’à présent le port d’arme. Dans la majorité des pays européens, même les armes non-létales (flash-balls, tasers, bombe lacrymogène…) sont prohibées dans le cadre de notre profession. Aussi, les articles 6 à 10 de la loi n° 2017-258 du 28 février 2017 autorisant le port d’arme en France sont venus bousculer tout cela.
Nous attendons naturellement le décret d’application qui viendra préciser le cadre d’application de cette loi. Mais il est probable que peu de choses ne changent. Avant la loi 258, un dispositif de protection rapprochée pouvait demander au Préfet un port d’arme, par dérogation. Aujourd’hui, la demande ne sera plus faite par dérogation, mais conformément à la loi. C’est à peu près la seule différence dans la forme. Dans le fond, il est fort à parier que les habitudes ne changeront pas. Certains dispositifs de protection continueront à être armés, au cas par cas, et de façon encadrée dans le temps, dans l’espace, et dans le nombre de munitions autorisées.
Une arme est-elle nécessaire pour protéger ?
Au-delà de cet aspect législatif, une question demeure sur le port d’arme. Un garde du corps doit-il posséder une arme ?… Techniquement, tous les gardes du corps chevronnés vous diront que lors d’une agression, on n’a pas le temps de sortir son arme. Notre mission en cas de problème majeur est d’évacuer avant tout. Dans un dispositif de protection SDLP (ex SPHP), les protecteurs armés ayant pour vocation d’utiliser leur arme sont les membres du GAHP. C’est l’acronyme de Groupe d’Appui des Hautes Personnalités. C’est un dispositif à part de l’équipe de protection, qui est présent si besoin. Dans le privé, en revanche, rares, très rares sont les dispositifs comportant un appui feu. Nous travaillons la plupart du temps à effectif réduit, budget oblige.
En France, il n’y eu guère que l’attentat du 10 Avril 1984 contre Charles Hernu qui justifia qu’un officier de sûreté des VO (futur SPHP) fît usage de son arme. Nous n’avons pas de retours suffisamment étayés en ce qui concerne le privé. Mais les statistiques semblent être à peu près identiques.
Aussi, recadrons le débat. L’intérêt de parler du port d’arme concerne surtout certains centres de formation de garde du corps en France. Ils ont bien compris que les armes attiraient les gens qui souhaitent se former en protection rapprochée. Ils en font donc un outil de vente attractif afin d’augmenter les formations qu’ils vendent, en montrant des gens transpirer face à une cible, arme en main. Tous ces centres ne disent pas, en revanche, qu’il n’existe aujourd’hui aucune structure qui recrutera un agent de protection rapprochée sur sa performance à l’arme à feu. Pire encore, les donneurs d’ordres et de missions fuient ces formations « cow-boy » et ceux qui en sortent comme la peste.
Est-ce à dire que c’est un faux sujet ?
Non, bien sûr. La protection rapprochée est à l’origine un métier d’arme. Mais il convient de replacer le port d’arme à sa juste place, surtout si il s’agit de travailler en France. Par exemple, avons-nous un débat identique sur les barrières métalliques de sécurité ?… Les barrières sont-elles indispensables à la protection rapprochée ?…. Tout dépend du lieu, du VIP, de la menace et bien sûr de la mission. Un port d’arme est, comme une barrière de sécurité, un outil de travail, utile dans certaines situations, et inutile dans d’autres. En revanche, ce dont personne ne parle, c’est que la barrière tout comme le port d’arme, ne font partie que de la sécurisation physique du VIP. Or un dispositif protection rapprochée ne compte pas que la sécurisation physique. Celle-ci n’est qu’une mesure parmi d’autres. Nous avons recensés 7 niveaux de protection différents qui participent à la protection d’une personnalité, et dont la sécurisation physique fait partie. Par exemple, un autre d’entre eux est la compétence en secourisme. Qui en effet voudrait se faire protéger par un garde du corps qui n’aurait qu’un SST en guise de rempart contre une atteinte ? Pourtant, la loi n’exige pas plus pour exercer notre métier. Les centres de formation en protection rapprochée quant à eux, n’abordent jamais ce débat, sans doute parce qu’une RCP est bien moins vendeuse qu’un glock 17…
Les armes chez APR de FRANCE et le NTTC
Quoi qu’il en soit, chez APR de France, la formation aux armes prend une part significative dans notre enseignement. Nous encourageons nos stagiaires à entretenir et développer sans cesse leurs compétences en la matière. Pourquoi ?
D’abord parce qu’une mission nécessitant un port d’arme ou la connaissance des armes peut subvenir quand on s’y attend le moins.
Ensuite, certains de nos stagiaires travaillent en zone dégradée. Ce sont des zones sensibles, voire pour certains bénéficiant d’une expérience dans une armée régulière, en zones de guerre.
Enfin et surtout, on ne peut anticiper la menace sans connaître et maîtriser soi-même les moyens d’action hostiles. C’est pourquoi le tir tactique ou la connaissance des armes en général reste un fondamental du métier. Le stand de tir et la connaissance des armes blanches ou contondantes sont un passage incontournable de la formation d’un Agent de Protection Rapprochée (APR).
Tous nos articles dans la rubrique « articles« .
– Publié par EEPR (Yannick CAYET), le 14 Septembre 2017
Ecole Européenne de Protection Rapprochée, centre de formation d’excellence de garde du corps
Découvrez nos formations en Protection Rapprochée : www.eepr.eu
Leave A Comment